Hôpital Saint-Antoine - Bâtiment Kourilsky - 5ème étage - 184, rue du Faubourg Saint-Antoine, 75012 Paris, France
La Rhumatologie à Saint-Antoine : LaRhumato.fr
L'arthrose, une maladie dégénérative affectant principalement les articulations périphériques et le rachis, touche 6 millions de personnes en France, avec une prévalence mondiale de la maladie estimée récemment à plus de 250 millions d'habitants. Globalement, l'arthrose périphérique/rachidienne est la cause la plus fréquente d'invalidité avec des dépenses médicales annuelles dépassant 3,4 milliards €, soit un doublement en 10 ans. Malheureusement, les seules stratégies de traitement cliniquement reconnues sont à visée symptomatique, et aucun médicament à visée structurale contre l'arthrose n'est approuvé. Un traitement efficace de l'arthrose est donc un besoin critique non satisfait.
Notre équipe regroupe des physiologistes, des biologistes cellulaires, des biochimistes, des rhumatologues et des orthopédistes qui se consacrent à la recherche de nouvelles cibles thérapeutiques contre l'arthrose. Pour cet objectif, nous tirons profit des connaissances récentes sur la pathophysiologie de la maladie :
Sur la base de ces découvertes récentes, nos principaux projets actuellement à l'étude sont :
1 - Trouver de nouveaux médiateurs impliqués dans la communication perturbée entre le cartilage et l'os sous-chondral dans un objectif de moduler leur expression à but thérapeutique.
Il existe un profond remodelage de la jonction ostéochondrale au cours de l’arthrose à l’origine de la disparition du cartilage articulaire et de la sclérose de l’os sous-chondral. Ce remodelage peut s’expliquer par une réactivation pathologique du processus d’ossification endochondrale qui inclut, une différenciation hypertrophique des chondrocytes, une minéralisation du cartilage, une angiogenèse augmentée et une résorption suivie d’une synthèse osseuse.
Le projet s’intéresse à déterminer les acteurs cellulaires et moléculaires à l’origine de ce remodelage pathologique. Dans le volet cartilagineux, nous nous intéressons à la différenciation hypertrophique des chondrocytes ; aux facteurs qui interviennent dans cette différenciation (projet collaboratif financé par la SFR) et à ceux produits par les chondrocytes hypertrophiques et qui pourraient stimuler l’angiogenèse et l’ostéoclastogenèse (financement ARDoC de la thèse d’I. Toillon). Dans le volet osseux, nous étudions les conséquences d’un stress mécanique excessif sur l’activité angiogénique des ostéoblastes. Nous étudions également le rôle que pourraient jouer les cellules du tissu adipeux médullaire (adipocytes et cellules stromales mésenchymateuses) (financement appel d’offre SFR Network et financement FRM du postdoc de N. Zapata). Nos données publiées (Eymard, Arthritis Rheumatol 2014 ; Eymard, Ann Rheum Dis 2017) et en cours d’écriture suggèrent en effet que les tissus adipeux intra-articulaires sont de nouveaux acteurs tissulaires impliqués dans l’arthrose (financement Ramsay Générale de Santé). Enfin, nous développons en collaboration avec un chimiste (Dr. J. Landoulsi) une nouvelle approche par microscopie à force atomique de l’analyse des modifications de la structure de la jonction ostéochondrale dans l’arthrose (financement IPV – Sorbonne Université de la thèse d’I. Jaabar).
Protéine 14-3-3 : Récemment, des études ont montré l'implication de l’immunité innée et de l'inflammation dans la progression de l'arthrose. Notre équipe a identifié la protéine 14-3-3ε comme nouveau facteur catabolique, produit par l'os sous-chondral et capable d'induire un phénotype catabolique sur les chondrocytes. Nous avons découvert que ces effets sont médiés, au moins en partie, par la signalisation via les récepteurs TLR2 ou TLR4, conduisant à l'activation de l'immunité innée comme le font les alarmines. De plus, il est établi que les alarmines peuvent stimuler l'activation des cellules immunitaires résidentes de la membrane synoviale, en particulier des macrophages conduisant à l’inflammation synoviale. Nous avons pu montrer que la polarisation des macrophages stimulés par 14-3-3ε semble les orienter vers un phénotype inflammatoire M1. Ainsi, nos résultats désignent 14-3-3ε comme une nouvelle alarmine dans l'arthrose, déclenchant des effets cataboliques et inflammatoires via la signalisation des TLRs. Ce nouveau candidat pourrait représenter une nouvelle cible à des fins thérapeutiques et / ou pronostiques.
2 - Déterminer le rôle des signaux inflammatoires/métaboliques/neuronaux externes sur les anomalies de communications intertissulaires qui pourraient être manipulées à des fins thérapeutiques.
Le phénotype d’arthrose métabolique1: Considérant l'association entre les maladies métaboliques et l'arthrose(2-5), nous avons cherché à comprendre pourquoi l'arthrose est plus fréquente et plus sévère chez les patients atteints de diabète de type 2, au sein du phénotype d’arthrose métabolique. En utilisant des explants de cartilage de patients arthrosiques diabétiques et non diabétiques, nous avons démontré que l'axe antioxydant Nrf2/HO-1 est déficient. Ce phénomène est également observé dans les chondrocytes murins cultivés soumis à une concentration élevée en glucose. L'altération de l’axe Nrf2/HO-1 est responsable d’une activation inflammatoire des chondrocytes, augmentant ainsi le niveau d'inflammation articulaire.
Le phénotype d'arthrose lié au vieillissement 6: L'accumulation de produits avancés de glycation (AGE) durant vieillissement tissulaire fait partie du phénotype de l'arthrose liée au vieillissement. Ces AGE modifient les propriétés biomécaniques du cartilage et induisent une activation des chondrocytes. Nous avons observé une accumulation d’un AGE, la CML (Nε-carboxymethyl-lysine) dans le cartilage des patients arthrosiques, cette accumulation étant plus marquée avec chez les patients âgés. Un tel phénomène pourrait être dû à une altération chondrocytaire du mécanisme adaptatif du Glo-1, une enzyme détoxifiante qui élimine le glyoxal, le précurseur de CML. Cette altération de l'activité enzymatique du Glo-1 pourrait être due à une inflammation liée à l'IL-1 et impliquerait aussi le stress oxydatif.
Au-delà de l'approche phénotypique de l'arthrose, nous avons également une vision intégrative de la pathophysiologie de l'arthrose. En substance, nous étudions le rôle du système nerveux autonome (et en particulier de son principal médiateur, l'acétylcholine) dans la physiopathologie l'arthrose et l’inflammation articulaire. A l’aide d'une méthode récente qui utilise un protocole d'immunomarquage 3D de l'ensemble de l'articulation, nous étudions l'innervation cholinergique des tissus articulaires (os sous-chondral et synovial) dans des échantillons articulaires humains et murins (collaboration avec Alain CHEDOTAL Institut de la Vision, INSERM, Paris, France). Nous cherchons aussi à déterminer si les chondrocytes et les ostéoblastes sont capables de produire eux-mêmes de l'acétylcholine (correspondant à une production non neuronale de l'acétylcholine) et si l’axe acétylcholine/récepteurs de l’acétylcholine (récepteur alpha-7 nicotinique (Chrna7)) peut réguler l'inflammation articulaire 7 (collaboration avec Uwe MASKOS, Unité de neurobiologie intégrative des systèmes cholinergiques, CNRS UMR 3571, Institut Pasteur, Paris, France).